Le "rapport Boulloche" :
le chemin des tiroirs ?

En 1968, les classes préparatoires aux grandes écoles réfléchissent sur leur avenir. Dans ce cadre, elle reprennent les éléments du « rapport Boulloche » paru en 1964.

Paru il y a 4 ans, le rapport BOULLOCHE aura-t-il été plus qu’un pavé dans la mare ? Une fois passées les réactions épidermiques de ceux qui se « sentaient attaqués » (la société des agrégés, les associations d’ingénieurs), ce rapport a rapidement pris le chemin des tiroirs. Il remet en effet, trop de choses bien établies en cause.

Mais quel intérêt peut alors présenter cette étude ? Que faire ? La seule attitude à observer est-elle de se résigner ou de fermer les yeux ? Prendrons-nous, nous aussi, le chemin des tiroirs ?

Au niveau de notre lycée, de notre classe, n'y a-t-il pas une manière différente d'aborder notre travail ? N'est-il pas possible de réfléchir à plusieurs sur les moyens à prendre pour palier à cette déformation ?

 

Des structures telles que les bureaux de classe,les conseils d’élèves pourraient faire déboucher cette réflexion par une action sur le plan du lycée. D’autres cadres (commissions, syndicats, etc...) peuvent aussi être envisagés. Il n'est que de ne pas laisser notre volonté et notre réflexion prendre le chemin des tiroirs...

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Selon la commission Boulloche :

- La durée des préparations aux grandes Écoles est trop longue.

- Les programmes et méthodes des classe préparatoires aux écoles d'ingénieur sont trop différentes de ceux de propédeutique.

- Le système des concours n'est pas souhaitable (remplacement par un système à trouver )

- Le rapport propose donc :

- d'arrêter le cycle du secondaire à la classe de première ;

- de bloquer la classe suivante (terminale) et la classe de propédeutique ou de préparation aux Grandes Ecoles dans les instituts spéciaux dont la fonction serait l'orientation et la préparation à l'enseignement supérieur.

Ceci appelle les observations suivantes :

- Le baccalauréat serait remplacé par un certificat de scolarité décerné par le conseil des professeurs (les instituts étant tous "publics" ). L'orientation serait faite en fonction des résultats obtenus dans l'établissement. L'élève pourrait alors, soit se diriger vers la vie active après une formation professionnelle appropriée, soit poursuivre la deuxième année vers Lettres, Droit ou Sciences.

- A l'issue de la deuxième année d'instituts, les élèves peuvent s'orienter soit vers la vie active soit vers les facultés ou les écoles ; un recrutement sur titres aurait lieu alors, comprenant. à la  fois une appréciation de l'institut et un échange de vues du jury avec le candidat.

- Dans ce cadre, il faut la suppression des classements. En ce qui concerne la scolarité des écoles elles mêmes, la commission a estimé que les classements comportaient plus d'inconvénients que d'avantages. Elle propose donc la suppression. Une telle mesure suppose évidemment des dispositions d'adaptation et notamment un effort particulier dans le domaine du contrôle des connaissances.

L'enseignement a un axe économique et social, (remplir une certaine fonction) et un axe culturel et humain qui est de rendre possible le progrès et l'épanouissement de chaque élément suivant ses caractères et sa vocation propre. Il fautproscrire le "bourrage" et la tendance à distribuer un enseignement encyclopédique, et éviter de mettre sur le marché de la vie active des jeunes gens inadaptés à la vie en société, au travail en commun. Il faudrait plutôt former le comportement

- interne (apprendre à acquérir des connaissances, à les utiliser, à savoir les dominer.)

- le comportement externe (communications, rapports humains).

L'ingénieur devant essentiellement s'adapter des circonstances nouvelles, le rapport estime que le nombre des matières enseignées doit être limité à l'essentiel (5 à 6 matières par année) et qu'il faut infléchir certains enseignements vers la recherche.

La commission a abouti à l'idée qu'il fallait, autant que possible, remplacer le système des amphis par des classes de 15 élèves environ, les élèves apprenant le cours avant la séance (avec contrôle régulier du travail permettant de supprimer les examens.).

Enfin, les stages devraient constituer un élément essentiel de la formation avec des objectifs clairement définis et délimités à l'élève et à l'entreprise. Le rapport insiste particulièrement sur l'organisation, des stages ( préparation à l’école et dans l'entreprise par la direction de l'école, stage suivi, réflexion en commun après le stage.

La commission a révélé dans un échantillon donné d'échecs, une proportion de boursiers de 25 % ; mais, ajoute-t-elle, "il s'avère que cet effort, pour important qu'il soit, ne permet pas d'assurer dans tous les cas l'indépendance financière des jeunes gens vis à vis de leur famille." De plus, nombre des élèves des écoles se livrent au "travail noir" difficilement compatible avec des études sérieuses.

Surtout, «  le système actuel est basé surl'assistance aux familles sans ressources qui font preuve de leur indigence » . La commission considère que « poursuivre des études supérieures constitue, pour qui en est capable,un devoir national, et que l'accomplis­sement de ce devoir implique une contre partie. » Contre partie dont la forme serait un système d'allocations et de prêts versés par les écoles :

1- Les allocations versées d'office à tous les élèves des écoles constitueraient au moins 50 % du budget minimum préalablement établi.

2- Le complément serait fourni sous forme de prêt sans intérêt à long terme à ceux qui en feraient la demande, sans justification des ressources familiales.

Enfin, la deuxième partie du rapport, examine la situation des écoles dans l'économie et l'aménagement du territoire. La commission est plutôt défavorable à la décentralisation des Grandes Ecoles en province ("déracinement") mais admet certains déplacements de "segments" d"écoles parisiennes. Une implantation globale, mieux équilibrée, sera obtenue par la création d'écoles nouvelles.