Récits d'enfance, Paris, Desclée de Brouwer, 2003

"Il y longtemps, je racontais des histoires à mes enfants, à mes élèves et à mes amis. Souvent, je profitais de Noël pour cela. Des nuits qui tombent avant qu'on ferme les cartables, des soirées qui n'en finissent pas. Je prétendais que c'était des contes de Noël. Sans doute parce qu'on y entrevoyait parfois quelques-unes de ces naissances inopinées, de ces choses et de ces êtres qui adviennent à l'improviste, au coin d'une vie ou d'un bois. Et qui changent tout... ou presque. Des histoires un peu tristes. Pour qu'on se dise, à leur écoute, qu'on peut, peut-être, tenter d'adoucir ensemble le monde. "

Philippe Meirieu

"Il faut prendre le temps de raconter des histoires. De se déprendre, un moment, de l'agitation quotidienne.

Il faut prendre le temps de raconter des histoires. De s'exposer à l'autre, de lui avouer, à demi mots, notre fragilité. D'hésiter. De s'emballer. De laisser s'échapper ces petits bouts humanité que nous cachons si bien.

Il faut prendre le temps de raconter des histoires. De livrer ces morceaux de vie minuscules où les détails, tout à coup, font sens. De tenir dans sa main un fragment d'existence miniature plus étrange et plus riche que l'échafaudage de toutes nos justifications sociales.

Il faut prendre le temps de raconter des histoires. Cela nous aide à regarder le monde. Dans ses moindres recoins. Et notre âme aussi. Dans nos moindres recoins...

Il y longtemps, je racontais des histoires à mes enfants, à mes élèves et à mes amis. Souvent, je profitais de Noël pour cela. Des nuits qui tombent avant qu'on ferme les cartables, des soirées qui n'en finissent pas. Je prétendais que c'était des contes de Noël. Sans doute parce qu'on y entrevoyait parfois quelques-unes de ces naissances inopinées, de ces choses et de ces êtres qui adviennent à l'improviste, au coin d'une vie ou d'un bois. Et qui changent tout... ou presque. Des histoires un peu tristes. Pour qu'on se dise, à leur écoute, qu'on peut, peut-être, tenter d'adoucir ensemble le monde.

Je livre aujourd'hui ces textes au public, conscient de l'impudeur. Et en souhaitant que les lecteurs les reçoivent comme jadis mes enfants, mes élèves et mes amis : des prétextes, des occasions de terminer eux-mêmes, seuls ou avec d'autres, ces récits à peine ébauchés."