Jean-Frédéric Oberlin

(1740-1826)

Petit dictionnaire de pédagogie

Vous trouverez ici un ensemble, régulièrement enrichi, de textes capables d'aider à comprendre quelques termes particulièrement utilisés dans les discours éducatifs. Ces textes n'ont pas de prétention encyclopédique, mais s'efforcent d'engager la réflexion et d'ouvrir au débat. Ils peuvent être complétés par des documents que vous trouverez dans les "Cours", les "Articles et conférences" ou les "Outils de formation". Pour une approche plus approfondie, on se reportera à mes ouvrages...

 

Adolescence, n. f. : période intermédiaire entre l'enfance et l'âge adulte, au cours de laquelle l'avènement de la maturité génitale bouleverse l'équilibre acquis antérieurement.

Si, d'aventure, un voyageur du temps nous revenait des siècles passés, sans doute ne manquerait-il pas de nous demander, au milieu d'une foule d'autres questions : « Mais comment peut-on être adolescent? »... C'est que - on l'oublie trop - l'adolescence n'a pas toujours existé; il est même aujourd'hui certains peuples, tout près de nous, qui ignorent totalement ce phénomène...

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Aide, n. f. : terme aujourd'hui très usité pour désigner, à la fois, des dispositifs éducatifs ("aide individualisée") et un projet pédagogique plus large qui consiste à "accompagner" les personnes dans leurs apprentissages ou leur développement. La notion n'est pas, pour autant, dénuée d'ambiguïté.

La question de l'aide en général et de l'aide pédagogique en particulier nous place au coeur d'un problème éthique. Peut-on parler d'une "éthique de l'aide" ? Cela n'est pas facile et nous renvoie à trois contradictions : 1) l'éthique relève de la symétrie entre les personnes et l'aide relève de la dissymétrie ; 2) l'éthique relève de la reconnaissance de l'altérité (y compris dans son caractère inconnaissable) et l'aide relève de la connaissance de la différence de l'autre ; 3) l'éthique relève toujours d'un choix individuel, de la responsabilité personnelle, alors que l'aide relève aujourd'hui - surtout si on l'associe à la prévention - d'une organisation collective et sociale...

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Alternance : n. f. : terme récent dans le domaine de la formation, apparu d'abord dans l'enseignement agricole. Désigne une formation qui fait alterner un temps de formation dite "pratique" (stage) et un temps de formation dite "théorique " (cours, recherches documentaires, analyses de pratiques, etc.). Comme l'oeuf de christophe Collomb, il fallait y penser... mais le voyage n'est pas terminé pour autant.

Pour comprendre les enjeux de l'alternance, il faut d'abord se demander pourquoi le système de formation s'est progressivement dégagé du système de production ? La création de lieux où l'on apprend, distincts des lieux où l'on produit est un phénomène relativement récent. Auparavant on apprenait sur les lieux de production eux-même par un "simple" compagnonnage. Les apprentis étaient mis directement au contact avec les impératifs de "la vie" artisanale, agricole, intellectuelle, industrielle, militaire, etc. Ce que l'on appelle aujourd'hui parfois (de manière un peu simpliste) "la pédagogie de projet" a été bien antérieure à la pédagogie dite "traditionnelle" : on a d'abord appris à forger en étant forgeron ; on a d'abord appris à écrire en copiant derrière l'épaule du copiste et non en pratiquant une méthode d'écriture ; on s'est d'abord formé à un métier au contact direct de la réalité économique...

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Anticipation, n. f. : activité centrale de tout éducateur qui consiste à aider un sujet à grandir en le considérant du point de vue de ce qu'il peut faire et devenir et non de ce qu'il fait et de ce qu'il est.

Peut-être cela paraîtra-t-il étonnant à beaucoup, mais je crois que la crise de l'éducation que nous vivons aujourd'hui peut être analysée comme une crise du rapport éducatif et de la gestion de ce que l'on pourrait nommer « la distance éducative », ou plus exactement comme une difficulté à anticiper « justement » ce qu'il convient d'attendre des personnes que l'on veut éduquer...

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Anti-pédagogues, néologisme désignant les intellectuels, essayistes, pamphlétaires et leaders d'opinion qui considèrent les pédagogues comme particulièrement dangereux car ils sacrifieraient les contenus de savoirs au profit de bricolages méthodologiques, prôneraient un égalitarisme qui ruinerait tout sens de l'effort chez les élèves et aboliraient l'autorité des maîtres.

En 1895, Henri Marion, à qui Jules Ferry avait confié la première chaire de « science de l’éducation » à la Sorbonne, est attaqué violemment par Ferdinand Brunetière, rédacteur à la très célèbre Revue des deux mondes : « Les jeunes gens n'ont pas besoin qu'on leur enseignât la pédagogie... Ayons avant tout des professeurs qui ne songent qu'à professer et moquons-nous de la pédagogie ! »

À bien des égards, les termes du débat n’ont pas changé : les pédagogues, préoccupés aussi bien des personnes que des méthodes, négligeraient les savoirs et confondraient l’enseignement avec une activité compassionnelle...

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Apprendre, verbe du 3ème groupe : activité consistant, pour un sujet, à s'approprier des savoirs, des connaissances ou des compétences et à pouvoir, ensuite, les réutiliser dans d'autres cadres que celui de leur apprentissage.

Voir aussi la "Charte" de l'association "Apprendre" fondée par Philippe Meirieu

Si je mets entre parenthèses la multitude de données, stabilisées ou embryonnaires, minutieusement recueillies et rigoureusement collectées par les psychologues, les sociologues, les anthropologues et les didacticiens sur ce que c’’est « apprendre »… alors, de toute évidence, c’est en termes de « principes » qu’il faut que je m’exprime. Des « principes » qui renvoient tout autant à des expériences qu’à des valeurs, des « principes » qui ressaisissent ce en quoi « apprendre » est, au-delà des « faits », un « événement » proprement humain dont l’apparente banalité cache le caractère profondément mystérieux.

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Et, sur la différence essentielle entre "désir de savoir et "désir d'apprendre"...

Attention, n. f. : mobilisation du psychisme sur un objet en vue de le découvrir, de le comprendre ou de l'apprendre ; capacité à se focaliser dans la durée sur des données en faisant abstraction des stimulations internes ou externes reçues par ailleurs... L'attention est un objectif de l'éducation ; elle doit être développée et maîtrisée afin de permettre d'accéder aux apprentissages. Le phénomène de l'inattention est aujourd'hui décrit comme une des grandes difficultés des enseignants.

Quand on regarde de près l’article « attention » du Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire de Ferdinand Buisson paru en 1878 sous la plume de Michel Bréal, on y trouve l’attention définie comme « la direction de toutes les forces intellectuelles sur un seul objet » : l’élève attentif doit « tendre toutes ses facultés » pour écouter une consigne, lire un texte ou effectuer un travail et, pour cela, « les appels réitérés à l’attention ne suffisent point ». Le maître est donc invité, à repérer les signes d’inattention, mais à ne pas s’épuiser, pour autant, à les dénoncer : « l’oreille des élèves s’habitue vite aux éclats de voix qui, dès lors, ne servent à rien ». En revanche, il doit mettre en place un ensemble de rituels pédagogiques qui scandent le déroulement de la classe et permettent de bien identifier, pour chacune des étapes, le comportement attendu : « Les questions doivent être adressées à la classe tout entière : aussi le maître fera-t-il toujours la question d’abord, puis il laissera la pause nécessaire pour trouver la réponse, et c’est alors qu’il nommera l’élève qui doit répondre. »

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Attitude, n. f., concept considéré comme "mou" par beaucoup de "spécialistes de l'éducation". Utilisé, ici, pour désigner une réalité souvent insaisissable : la même séquence d'apprentissage peut s'avérer très efficace... ou fort peu, selon "l'attitude" du formateur. Or, les critères purement techniques ne peuvent guère venir à bout de l'analyse de cet écart.

Pour assumer sa fonction, c'est-à-dire pour fournir au plus grand nombre d'élèves les concepts et la volonté qui leur permettront de comprendre et de maîtriser le monde dans lequel ils seront insérés, l'Ecole a besoin, plus que jamais, d'outils et de dispositifs élaborés ; elle a besoin de mobiliser toutes les techniques qui sont à sa disposition, sans exclusive ni anathème, afin de répondre, par la variété des itinéraires et des supports d'apprentissage, à l'hétérogénéité des élèves... La montée inéluctable de cette l'hétérogénéité peut être une chance, d'ailleurs, pour l'Ecole, à condition que les maîtres renoncent à placer la reproduction d'un modèle formel de la classe, ou tout le monde fait la même chose en même temps, comme critère essentiel de la réussite pédagogique. La conformité aveugle à ce modèle - d'ailleurs fort récent dans l'histoire des institutions éducatives - est aujourd'hui le verrou majeur à la transformation positive des pratiques.

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Autoformation, n. f., néologisme apparu dans le champ de la formation des adultes et désignant la démarche par laquelle un sujet s'approprie seul des connaissances, à son initiative. Par extension, désigne le processus d'appropriation lui-même qui est toujours "auto" (un sujet ne s'approprie vraiment des connaissances que dans et par une démarche personnelle), même s'il nécessite toujours un apport extérieur ("Tout autodidacte est un imposteur." Paul Ricoeur).

Disons-le d'emblée, et aussi provocateur que cela puisse paraître, il n'y a d'apprentissage véritable qu'en autoformation . En d'autres termes, il n'y a de savoir authentique que parce qu'un sujet construit des connaissances en élaborant des réponses aux questions qu'il se pose, en cherchant des informations lui permettant de surmonter les obstacles qu'il rencontre, en élaborant des schèmes d'action répondant à des familles de problèmes qu'il sait identifier, en ajustant ses propositions en fonction des aléas qui se présentent, en adaptant ses comportements en fonction de situations nécessairement imprévisibles, en réinvestissant progressivement ses acquis pour accroître sa capacité à apprendre et à apprendre encore. Allons plus loin : il n'y a de véritable formation que par alternance . En d'autres termes, nous ne nous formons que parce que parvenons à établir une véritable dialogue entre des situations qui nous font problème et des connaissances qui nous aident à construire des solutions. Mais, contrairement à ce que l'on croit parfois, les problèmes ne se trouvent pas seulement dans la "pratique" et les solutions dans la "théorie"...

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Autonomie, n. f. : terme utilisé très fréquemment en pédagogie pour désigner la capacité de "se conduire selon son propre vouloir". Il fait l'objet d'un trop large consensus pour ne pas poser problème.

À lire la plupart des projets d'écoles ou des projets d'établissements, à consulter les instructions ministérielles, à entendre les parents et les enseignants, on découvre que l'"autonomie" est au centre de tous les discours. On veut former des élèves autonomes, des enfants autonomes, former à l'"autonomie requise pour l'exercice d'une citoyenneté responsable", etc. Or, à regarder de près les pratiques scolaires et les comportements des élèves, on découvre que, en réalité, ce n'est pas l'autonomie qui est développée mais bien plutôt quelque chose comme la débrouillardise...

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Autorité, n. f. : terme associé le plus souvent au mot "crise" dans les expressions "crise de l'autorité", "autorité en crise". Association dommageable dès lors qu'on revient à l'étymologie du mot : "ce qui autorise", "ce qui rend auteur".

La crise de l'autorité est devenue, aujourd'hui, un lieu commun et semble à l'origine de tous nos maux. À tort et à raison. À tort, parce que, depuis toujours, les adultes se sont plaints de l'arrogance des jeunes générations : les plus vieux textes écrits dont nous disposons déplorent le manque de respect des jeunes envers leurs aînés... Mais à raison aussi : parce que nous ne sommes plus, en France, dans une société théocratique. Le ciel n'est peut-être pas vide, mais, de toute évidence, il est muet : il n'existe plus de parole morale qui s'impose à tous...

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Banlieues, n. f., souvent employé au pluriel pour désigner, de manière très restrictive, les "banlieues populaires" qu'on dit "difficiles". Métaphore pédagogique intéressante pour désigner les lieux où s'engagent des initiatives en direction de ceux qu'on dit "inéducables". A cet égard, synonyme de "marge", au sens de Jean-Luc Godard : "C'est la marge qui tient la page."

C'est finalement toujours à la périphérie des grands systèmes éducatifs, à la marge des institutions officielles, dans les banlieues de la pédagogie, que sont apparues les questions, les méthodes et les outils qui ont permis de faire progresser l'activité éducative. C'est Pestalozzi avec les orphelins de Stans, aux prises avec la résistance d'enfants qui ne veulent pas que l'on « fasse leur bien malgré eux ». C'est Itard inventant, pour Victor de l'Aveyron, les premiers matériaux pédagogiques que développent aujourd'hui, sous des formes plus complexes mais avec les mêmes principes, les spécialistes de la petite enfance. C'est Maria Montessori prenant en charge des enfants abandonnés de tous et créant pour eux des dispositifs qui sont encore utilisés dans les meilleures de nos écoles maternelles....

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Classe, n. f., terme emprunté probablement au domaine scientifique (la botanique) qui désigne un ensemble d'enfants à qui il est proposé un même enseignement. Dans l'usage courant, ce mot renvoie à des "élèves" de même âge et à peu près du même niveau censés faire la même chose en même temps sous l'autorité du maître.

Aucun d’entre nous n’est assez âgé pour avoir connu autre chose qu’une école organisée en « classes ». C’est pourquoi nous vivons toujours, plus ou moins, avec la même représentation : une classe doit être composée d’élèves du même âge et d’un niveau semblable, qui font à peu près la même chose en même temps. Certes, il reste bien encore, ici ou là, quelques classes à plusieurs niveaux, voire des classes uniques en zone rurale, mais c’est là une situation dont le système éducatif cherche à se débarrasser – en créant, par exemple, des « regroupements pédagogiques »1 – ou à laquelle nous nous résignons, faute de mieux…

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Citoyenneté, n. f., néologisme assez peu heureux formé à partir du beau terme de "citoyen". S'utilise beaucoup, dans la vulgate pédagogique, dans l'expression "éducation à la citoyenneté". Peut désigner des activités spécifiques (éducation civique, pratique du "conseil d'élèves", etc.) ou recouvrir une conception pédagogique plus globale dans laquelle la transmission des savoirs n'est pas séparée du processus d'émancipation permettant l'émergence du citoyen pur une société démocratique.

Ce n'est pas un des moindres paradoxes de notre modernité que le désintérêt des démocraties pour la formation de leurs citoyens et, donc, pour leur propre pérennité. Alors que tous les régimes totalitaires, quelle que soit leur idéologie de référence, consacrent une énergie considérable à inculquer aux enfants le catéchisme qui garantira leur assujettissement futur, les démocraties, elles, se contentent d'injecter une heure d'éducation civique ici ou là... avec si peu de conviction que chacun convient, en aparté, qu'elle peut passer à la trappe à la première occasion ! On semble ainsi se résigner à l'emballement de l'individualisme, à la disparition des règles de vie commune et à l'emprise des communautarismes. Or, l'École pourrait avoir alors, ici, une place déterminante... Or, l'École pourrait avoir alors, ici, une place déterminante. À condition de mener de front un double travail : d'une part, aider chaque élève à échapper à toutes les formes de tribalisme qui imposent la conformité à la norme et interdisent toute liberté de penser ; et, d'autre part, apprendre en permanence à chacun à se décentrer par rapport à ses préoccupations immédiates et ses intérêts personnels pour s'associer à d'autres et aller vers l'universel...

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Collège, n. m. : désigne l'institution intermédaire entre l'école primaire (fondée par Jules Ferry) et le lycée (fondé par Napoléon). cette institution intermédaire scolarise des enfants de 11 à 16 ans environ et hésite en permanence, depuis des années, entre le statut de "super école primaire" et celui de "petit lycée".

Le collège français correspond à ce que l'on nomme, dans les recherches internationales, "l'école moyenne". A peu de choses près, la fin du collège correspond aussi chez nous, pour beaucoup d'élèves,   à la fin de la scolarité obligatoire. Or, cette notion de "scolarité obligatoire" a, peu à peu, disparu du vocabulaire, comme si l'on hésitait maintenant à l'employer avec toute sa charge historique et sa signification sociologique. Or, si l'on revient aux sources de la "scolarité obligatoire", on est frappé de l'importance que la société avait donnée à cet objectif. Car, contrairement à ce que l'on a prétendu parfois, Jules Ferry, en faisant adopter les lois laïques, n'a nullement cédé à la demande économique qui aurait imposé une augmentation du niveau d'instruction...

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Connaissances scolaires : expression désignant l'ensemble de ce qui est enseigné à l'école. Renvoie, d'une part, aux programmes d'enseignement (que les sociologues nomment le curriculum formel) et à de nombreuses autres connaissances qui sont acquises parfois à l'insu de l'enseignant et de l'institution (le curriculum caché). Dans le débat pédagogique, l'expression est souvent opposée (de manière polémique) à "compétences", sous forme d'une alternative : "Faut-il enseigner des connaissances ou des compétences ?".

Chaque fois que l'on joue sur un couple de mots que l'on oppose - comme "connaissances" et "compétences" -, on prend le risque de simplifier considérablement les choses, voire de les caricaturer. Tentons cependant de définir rapidement ces deux termes . Les connaissances et les compétences sont, pour moi, des médiations éducatives qui permettent aux élèves qui les acquièrent d'échapper, au moins partiellement, à la violence des situations physiques, psychologiques et sociales dans lesquelles ils sont impliqués. Les unes et les autres peuvent être acquises de manière superficielle, empilées à court terme, pour faire face à des situations d'examen par exemple ; mais les unes et les autres peuvent aussi être intégrées dans la dynamique intellectuelle d'un sujet et contribuer réellement à son émancipation. Plus précisément, je nommerai ici "connaissances" des savoirs essentiellement programmatiques, renvoyant à des disciplines précisément identifiées, mobilisables pour résoudre des problèmes qui se posent spécifiquement dans le champ épistémologique de ces disciplines. En revanche, je nommerai "compétences" des savoirs renvoyant à des situations complexes qui amènent à gérer des variables hétérogènes et qui permettent de résoudre des problèmes qui échappent à des situations référables épistémologiquement à une seule discipline...

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Connaître (l'enfant, l'élève) v. t., activité peu identifiable et dont on perçoit difficilement le terme, mais considérée souvent, dans le domaine pédagogique, comme un préalable nécessaire à l'action avec (ou sur) l'enfant ou l'élève : "Pour enseigner les mathématiques à John, il ne faut pas seulement connaître les mathématiques, il faut aussi connaître John".
Conseiller(e) principal(e) d'éducation (CPE) : fonction créée au sein des lycées et collèges en 1970 et revalorisée par la Loi d'Orientation de 1989, elle s'est substituée à la fonction de "surveillant général". Le ou la CPE est placé auprès du chef d'établissement et responsable de la "vie scolaire".

Le danger permanent, dans l’Education nationale, quand on découvre des problèmes ou des besoins nouveaux, c’est de spécialiser des personnes et des fonctions dans leur traitement. Certes, il fallait créer les documentalistes car, à partir d’un certain moment, les enseignants des différentes disciplines ne pouvaient plus maîtriser la complexité des questions et des outils documentaires. Et « documentaliste » est aujourd’hui un vrai métier, avec une réelle identité professionnelle, des compétences et un savoir-faire spécifiques. Mais l’existence des documentalistes ne peut décharger les enseignants du souci documentaire...

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Coopérative (pédagogie) : expression dont le premier usage systématique est dû à Barthélémy Profit qui fonda des "coopératives scolaires" après la première guerre mondiale pour contribuer à la "reconstruction" du système scolaire et former les élèves à la solidarité. Mais c'est Célestin Freinet qui théorisa et mit en pratique une "pédagogie coopérative" intégrant la totalité de "la vie" de la classe, en particulier les apprentissages eux-mêmes.

Dans l’histoire de la pédagogie, la coopération entre élèves prend sa source au sein de plusieurs courants. On la trouve promue, dès le 18ème et le 19ème siècle, par les pédagogues libertaires comme Joseph Jacotot, Sébastien Faure et Paul Robin, par exemple. Pour eux, la coopération est, essentiellement, une subversion des rapports de pouvoir entre le « sujet-supposé-savoir » et les « individus-supposés-apprendre ». Ces rapports préfigurant et légitimant les rapports de domination au sein d’une société profondément injuste, il faut les faire disparaître dès l’école : ils vont donc proposer de les remplacer par un co-apprentissage permanent où chacun et chacune va faire profiter les autres de ce qu’il sait et où ils chercheront ensemble ce que nul ne sait déjà. Mais cette conception va se heurter à deux difficultés majeures...

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Crise de l'autorité : expression qui renvoie, dans les références savantes, aux analyses d'Annah Arendt ("La crise de la culture", 1961) et exprime la difficulté qu'ont les adultes à assumer la responsabilité du monde et de sa transmission. Plus trivialement, l'expression désigne la difficulté, voire l'effondrement, de la possibilité pour les adultes en général, et les éducateurs en particulier, à se faire obéir par les enfants.

La « crise de l’autorité » désigne le plus souvent, aujourd’hui, le refus des enfants et adolescents se soumettre spontanément aux injonctions de ceux et celles qui incarnent le pouvoir au sein de l’institution. Simplifions : jadis, quand l’enseignant entrait dans sa classe, « l’Ecole était faite » : les rôles étaient distribués, les prérogatives et les interdits identifiés, les écarts à la norme ritualisés (on attendait que le cancre s’endorme et que l’amuseur de service fasse un bon mot). Depuis la montée de l’individualisme social, corollaire de l’effondrement des théocraties, nos sociétés vivent un mouvement de désinstitutionnalisation progressive : les codes sociaux ne sont plus considérés comme légitimes, mais, au contraire, soupçonnés d’être des entraves à la liberté individuelle. Chacun se demande si, au sein de l’institution, son « intérêt » (ce qui l’intéresse et ce qui est dans son intérêt) ne sera pas sacrifié à un arbitraire qui lui échappe ou au bénéfice de quelques privilégiés. Le maître doit donc « refaire l’Ecole » régulièrement : il doit reconstruire en permanence le cadre qui lui permet d’exercer sa mission.

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Débat éducatif français (origines) : le débat sur l'éducation et l'école est un débat récurrent en France qui donne le sentiment, pour qui s'y plonge un peu, d'un étrange bégaiement. Pour le comprendre, on peut remanter à l'opposition entre Voltaire et Rousseau qui est fort instructive.

L’École et, plus généralement, l’éducation font aujourd’hui, l’objet de débats passionnés en France et dans la francophonie. Pour les comprendre, peut-être faut-il prendre un peu de recul ? Ils tiennent, d’abord, à notre tradition philosophique. La France a été et reste marquée par l’opposition entre Voltaire et Rousseau : le premier incarne « l’esprit français », brillant, cinglant et capable de tout justifier en quelques pirouettes ; il est adulé par ses contemporains qui voit en lui l’incarnation même de l’homme du monde cultivé. À l’opposé, Rousseau est un être tourmenté, perpétuellement inquiet et à « l’esprit d’escalier », comme il le dit lui-même ; il ne brille guère en société et, peu apprécié de ses contemporains, fuit de refuge en refuge sans jamais véritablement trouver le repos. Le premier est toujours « en phase » avec l’événement, le second toujours décalé ; le premier est un homme de la répartie, le second un homme de l’intériorité ; le premier donne à voir et à admirer, le second à entrer en soi et à méditer.

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Débat éducatif français (actualité) : sans doute en raison des liens historiques très forts que l'Etat y entretient avec l'Ecole, le débat éducatif français est, depuis longtemps, très violent. Il a pris, cependant, ces vingt dernières années, une tournure particulièrement polémique en opposant les "républicains" et les "pédagogues". Tout le monde trouve cette opposition stupide et, pourtant, elle revient sans cesse.

Depuis les années 1984 et le ministère Chevènement, on repère, en effet, assez nettement, dans le débat éducatif, deux conceptions qui s'affrontent au sein même de la mouvance "progressiste": d'un côté, on valorise la transmission culturelle et l'on fait valoir que, la culture étant, par essence, dépassement du particulier pour accéder à l'universel, l'attention aux personnes dans leur singularité, la prise en compte de leurs préoccupations et de leurs centres d'intérêts, mettent gravement en question la vocation même de l'institution scolaire. D'un autre côté, on souligne qu'il n'y a pas d'appropriation culturelle qui ne puisse s'effectuer sans que l'on s'appuie sur ce que le sujet sait déjà, sur les questions qu'il se pose ou qu'on l'amène à se poser, sur sa manière d'apprendre, sur son histoire singulière...

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Démocratie, n. f., désigne un régime politique qui, selon la formule célèbre est "le pire de tous, à l'exception de tous les autres". Ce régime est basé sur la participation de chaque citoyen à la volonté collective par l'intermédiaire de consultations électorales. En pédagogie, la question se pose souvent de savoir si l'école est un "lieu démocratique" ou un "lieu de formation à la démocratie".

Il n'est jamais vraiment inutile de rappeler que, dans une démocratie, le vote d'un individu majeur reste bien l'acte politique par excellence, celui par lequel tous les citoyens, sur un pied d'égalité, participent à l'exercice du pouvoir et pèsent sur des choix qui conditionnent tous les autres. On ne peut laisser penser aux jeunes générations qu'il est indifférent de choisir tel ou tel homme ou parti politique, puisque eux-mêmes, ensuite, vont s'engager dans des manifestations de lutte ou de soutien de ces mêmes hommes et partis... C'est pourquoi il faut, tout à la fois, développer une éducation au politique et, par ailleurs, marquer solennellement l'entrée dans la vie politique...

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Désir d'apprendre, expression utilisée fréquemment pour désigner une sorte d'aptitude innée de tout individu, en particulier les enfants, qui les amènerait à chercher spontanément à s'informer et à comprendre. En réalité, lieu commun néo-rousseausiste (que n'aurait jamais assumé Rousseau) qui néglige que "le désir de savoir" ne se transforme pas miraculeusement en "désir d'apprendre".

La modernité exaspère la contradiction entre le désir de savoir - tout et tout de suite - et le projet d'apprendre qui impose de tâtonner, d'assumer l'ignorance et d'apprivoiser le temps. « Savoir » et « apprendre » ne sont pas synonymes. Le goût d'apprendre s'est effondré chez beaucoup d'élèves dans la volonté de savoir. C'est parce qu'ils veulent « savoir tout de suite » qu'ils ne comprennent pas la nécessité d'apprendre. La modernité technique elle-même organise de manière systématique nos activités pour que nous puissions savoir sans apprendre et sans avoir appris. Il faut que les enseignants comprennent que la modernité agit de la sorte ; dans le cas contraire, ils ne comprendront pas pourquoi il est si difficile aux élèves de renoncer à savoir tout de suite pour prendre le temps d'apprendre. De la même manière, la modernité exaspère une contradiction entre « le primat du réussir » et « le primat du comprendre »...

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Devoirs (à la maison) : interdits dans l'enseignement primaire depuis 1956, ils n'en restent pas moins très présents et prennent de plus en plus d'importance dans l'enseignement secondaire... Au point que, dans ce dernier, l'école devient le lieu où l'on va prendre quelques informations... avant de rentrer chez soi faire son travail. Comme si les professeurs d'EPS dictaient en classe les règles du basket et donnaient le match à faire à la maison !
Assez curieusement et par un étrange renversement, les « devoirs scolaires » sont aujourd’hui identifiés comme des travaux que l’on fait à la maison, ou, pour les élèves internes, en étude… mais, dans tous les cas en dehors de la présence d’un professeur. Certes, il existe des structures encadrées par les enseignants sous des noms divers (aide individualisée, accompagnement personnel, tutorat, etc.), mais, dans l’immense majorité des cas, ce qui se fait là relève plutôt d’une « pédagogie de soutien » qui reprend des notions mal comprises en classe et n’exonère en rien l’élève de son travail personnel à la maison... Pourtant, historiquement, le travail personnel de l’élève – qu’il concerne la mémorisation, l’entraînement, la recherche ou l’élaboration personnelle – a été conçu comme un des éléments fondamentaux de la scolarisation, devant être effectué en classe ou, au moins, sous la responsabilité directe de l’école.

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Didactique, n. f., terme utilisé par Comenius au XVIIème siècle pour désigner l'effort rationnel de transmission des connaissances à tous les hommes. Aujourd'hui, on parle plutôt "des didactiques" des différentes disciplines qui travaillent sur les conditions de leur enseignement. A ne pas confondre, évidemment, avec la pédagogie.
Différences, n. f. le plus souvent utilisé au pluriel dans la réflexion pédagogique. Désigne un ensemble très vaste de spécificités individuelles et collectives, en particulier dans l'expression "prendre en compte les différences". En réalité cette question ne peut guère être traitée à un tel niveau de généralité.

Chacun connaît la célèbre formule de Bourdieu selon laquelle c'est d'abord "l'indifférence aux différences" qui reproduit les inégalités. Car cette indifférence présuppose une égalité de chances et de capacités qui n'existe pas en réalité. Pire, elle alimente le fantasme extrêmement dangereux d'une homogénéité possible qui serait même la condition d'efficacité de l'école, voire de survie de la société : nous ne sommes pas loin du mythe de la " race pure "... Alors que notre société connaît des dérives sectaires et des replis communautaires inquiétants, l'école continue à générer l'exclusion, à creuser le fossé entre les enfants dits "normaux" et les autres, handicapés, déficients, ou simplement en situation d'échec...

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Echec scolaire : expression peu usitée jusque dans les années 1960 et qui ne commence à désigner une véritable problème social et politique que dans les années 1980. Tout le monde veut "lutter contre l'échec scolaire"... Mais pas nécessairement de la même manière.

La notion d’échec scolaire est assez récente. Elle n’apparaît guère avant les années 1960 et ne devient un véritable problème social et politique que dans les années 1980. Car, dans la tradition élitiste française, les échecs étaient plutôt des solutions… au problème de la sélection. Dès lors que l’héritage des charges et des biens ne pouvait plus être – au moins en théorie – le critère de structuration de la hiérarchie sociale, la réussite scolaire, et son corollaire, l’échec, permettaient de faire le tri ! Cela nous est devenu aujourd’hui insupportable. Pourquoi ?

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Ecole : mot générique qui désigne une organisation de la transmission de connaissances de manière formelle à un ensemble d'individus. On en trouve des premières formes dès l'âge de pierre où l'on enseignait la taille des silex. L'école n'est pas à confondre avec "la forme scolaire" (organisation par classes homogènes).

Les anthropologues racontent qu’au Népal, pas très loin de la frontière du Tibet, il existe des villages Limbu où subsiste encore une étonnante forme d’école : les adultes aguerris se réunissent régulièrement, le soir, autour du feu, pour débattre des questions importantes qui les occupent et échanger les savoirs et les savoir-faire qu’ils ont acquis ou viennent de découvrir. Non seulement les enfants sont exclus de ces rencontres, mais les adultes placent des gardes armés aux masques inquiétants tout autour pour les empêcher d’approcher. La ruse fonctionne toujours : avec de savants stratagèmes, les enfants réussissent à déjouer la vigilance des sentinelles complices et à voler quelques-uns de ces savoirs si précieux qui leur sont cachés. En réalité, les gardiens sont parfaitement entraînés : ils effraient mais laissent passer les enfants en fonction de leur âge et des savoirs qui s’échangent entre adultes.

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Ecole nouvelle : expression née probablement en 1899 à l'occasion de la création de l'école d'Abbotsholme par Cecil Reddie ; désigne une école où l'on se propse de faire découvrir les savoirs aux élèves en les mettant en situation d'activité.

Pour bien des « républicains », encore aujourd'hui, l'Ecole Nouvelle est associée à des valeurs contraires aux valeurs fondatrices de la République. Et il est vrai que l'on peut comprendre cette position pour deux raisons au moins : d'une part, parce que les premières "écoles nouvelles" furent des initiatives privées qui s'installèrent au moment même où l'Etat cherchait à contrôler un système éducatif atomisé et à lui imposer des valeurs et des pratiques communes capables de fonder l'unité de la République.

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Educabilité, n. f., néologisme utilisé en pédagogie au XXème siècle (Rousseau employait le terme de "perfectibilité"). Désigne un postulat fondateur de toute activité éducative qui interdit d'attribuer une difficulté ou un échec d'un sujet à son "absence de dons".
Education formelle et non formelle, expressions qui se stabilisent aujourd'hui, en particulier en Europe, et qui désignent et opposent, d'une part, l'éducation scolaire relevant d'institutions identifiées comme l'Ecole et, d'autre part, les activités éducatives encadrées par des associations diverses qui effectuent, par exemple, de l'accompagnement scolaire. On peut y ajouter, aussi, l'éducation informelle qui comprend tout l'environnement éducatif (médias, culture, etc.).

L'École peut-elle, à elle seule, produire la réussite scolaire et sociale des enfants ? Pour répondre à cette question, il convient de faire un petit retour en arrière et de comprendre les finalités les objectifs et les méthodes de l'institution scolaire. Cette institution, sous la forme que nous lui connaissons aujourd'hui, est extrêmement récente au regard de notre histoire : un siècle et demi, guère plus ! Ses principes de fonctionnement datent de Comenius, un philosophe et pédagogue tchèque protestant, qui les formula et les mit en oeuvre dans ses ouvrages à la fin du XVIIème siècle. Comenius avait observé que les apprentissages de toutes sortes, y compris professionnels, s'effectuaient de manière bien trop aléatoire et il souhaitait les rendre, tout à la fois, plus égalitaires et plus rigoureux. Pour que tous les enfants accèdent aux savoirs jugés fondamentaux, il mit en place un système qui tendait à en faire, pour tous sans exception, des apprentissages obligatoires, progressifs et exhaustifs....

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Education nouvelle : mouvement pédagogique qui émerge à la fin du 19ème siècle et se structure en 1921 au Congrès de Calais, en donnant naissance à la Ligue internationale de l'Education nouvelle. Traversée de contradictions, mais toujours féconde, l'Education nouvelle constitue une des sources principales d'inspiration de la réflexion pédagogique aujourd'hui.

Même si l’on peut en déceler les prémices dès le XVIIIème siècle, le mouvement de l’Éducation nouvelle ne s’est vraiment structuré qu’au début du XXème siècle. Dans les années 1900, on voit, en effet, se développer, en marge des systèmes scolaires, des initiatives pédagogiques originales. Elles s’organisent autour de quelques principes de base : « l’enfant apprend en faisant », « les élèves doivent être mobilisés sur de vrais projets d’envergure, à l’image de ce qui existe dans la “vraie vie” », « les savoirs s’acquièrent ainsi de façon naturelle et non plus à travers l’arbitraire des programmes », « les règles et la discipline doivent émaner du collectif lui-même afin de former de véritables citoyens », etc. Ainsi se construit une sorte de « doctrine » qui sera formalisée en 1921, lors du Congrès de Calais, au moment de la création officielle de la Ligue internationale pour l’Éducation nouvelle.

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Education populaire : expression assez largement ringardisée et qui désigne, pourtant, un mouvement particulièrement important et fécond dans l'histoire de l'éducation en France. Il n'est pas certain, d'ailleurs, que l'on n'ait pas encore beaucoup à apprendre de l'Education populaire.
Elève au centre : expression qu'on considère parfois comme étant apparue à l'occasion de le Loi d'Orientation sur l'Education de 1989, alors que Lionel Jospin était ministre de l'Education nationale (elle figure dans le "rapport annexé à la loi"). Rarement revendiquée, elle est, en revanche, souvent utilisée pour décrier "le pédagogisme" dont elle serait porteuse.

La légende voudrait que l’expression « l’élève au centre » soit apparue, dans les années 1980, sous la plume de « pédagogistes » notoires, adeptes de la « non-directivité » et partisans acharnés de
« l’enfant-roi » ; reprise dans la loi d’Orientation de 1989 proposée par Lionel Jospin, elle marquerait l’abandon de toute exigence et soumettrait définitivement les enseignants aux caprices d’enfants désormais promus « maîtres du monde ». Hélas – heureusement, plutôt ! –, il n’en est rien. En effet, la formule « l’école centrée sur l’élève » émane d’un mathématicien allemand, directeur d’École normale, député au Parlement de Prusse, Adolf Diesterweg (1790-1866) et fut reprise en 1892 par Octave Gréard (1828- 1904), collaborateur de Jules Ferry, ancien élève de l’École normale supérieure, membre de l’Académie française et promoteur infatigable d’un enseignement culturel exigeant en faveur des filles, jusqu’alors écartées du lycée.

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Ennui : terme, tout à la fois, banal et banni dans l'institution scolaire. Banal, parce que le phénomène paraît très généralisé et que tous les anciens élèves en témoignent. Banni, parce que ce phénomnène semble relever de "l'impensable" pour beaucoup d'enseignants.

L'ennui est un phénomène ancien avec, sans aucun doute, des manifestations nouvelles. Nous assistons au passage d'un ennui contenu dans les limites de la convenance scolaire, à un ennui qui s'étale ostensiblement dans son arrogance et interroge la légitimité des enseignants et menace même l’équilibre de l’institution. C'est moins la réalité du phénomène ennui qui pose problème aux enseignants, aujourd'hui, que ses manifestations vécues comme beaucoup plus agressives de la part de ceux qui sont chargés d'enseigner dans l'institution scolaire. En d'autres termes, la convenance scolaire est devenue, pour un grand nombre d’élèves, une « langue étrangère ». Face à ce constat, trois comportements sont possibles...

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Entraide, n. f., terme désignant une relation entre des élèves de même classe ou de classes différentes, de même niveau ou de niveaux différents qui "s'enseignent réciproquement", soit en transmettant des acquis, soit en accompagnant le travail d'autrui. Il y a peut-être encore quelques enseignants qui se souviennent de la sévère mise en garde entendue jadis pendant leur formation : « Quand deux élèves discutent ensemble, c’est qu’ils complotent contre le maître. Faîtes cessez cela tout de suite ! » Nous n’en sommes heureusement plus là ! Les enseignants savent aujourd’hui que la prise de parole des élèves en classe doit être encouragée, que les échanges entre élèves sont un excellent moyen de faciliter la compréhension et que l’apprentissage de l’oral est un élément essentiel pour réussir sa scolarité, mais aussi, bien sûr, pour se former à la citoyenneté.
Et pourtant, les pratiques dans ce domaine restent très inégales et inégalitaires. Si, en classe, on demande parfois aux élèves de travailler ensemble ou de faire un exposé, pas mal d’heures de cours restent formatées de manière traditionnelle et la parole du maître n’y est interrompue que par les réponses de quelques élèves – souvent toujours les mêmes – aux questions qui leur sont posées de temps en temps.

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Entreprise, n. f., désigne un organisme qui produit des richesses économiques et, pour cela, s'appuie sur les compétences des personnes qu'elle utilise au mieux. A l'inverse de l'école dont la mission est de faire acquérir des compétences nouvelles à ceux qui ne les ont pas.
Erreur, n. f., souvent confondue avec "faute", désigne un comportement intellectuel, une représentation ou un résultat erronés au regard de l'exigence de précision, de justesse et de vérité. L'errueur est, en réalité, un appui précieux pour enseigner. Étrange paradoxe de l’erreur en situation scolaire : alliée et adversaire à la fois! Inévitable dans la démarche toujours tâtonnante de celui qui apprend… et obstacle à surmonter pour accéder à plus de précision, de justesse et de vérité. Moment fécond si, loin de décourager l’élève, il lui permet de comprendre comment progresser… et, en même temps, « résidu » de vieux automatismes ou de conceptions anciennes qu’il faut se résigner à éradiquer. Occasion extraordinaire d’exercice de l’intelligence critique… et, simultanément, épreuve souvent difficile quand il faut faire son deuil de ce qui a été, un temps, une partie intégrante de soi et même, parfois, un outil de sa construction identitaire. Dépassement et renoncement. Renoncement et dépassement. Étroitement liés et, donc, générateurs de perplexité, d’inquiétude, voire d’angoisse.

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Etonnement, n. m., terme qui exprime un état mental caractérisé par l'imprévisibilité et la surprise. Constitutif de toute entreprise de d'apprentissage ou de recherche qui ne peut anticiper par avance ce qu'elle va trouver. Etroitement lié au plaisir d'apprendre.

Pris en tenaille entre routine et sidération, l’étonnement semble s’être aujourd’hui discrètement replié dans quelques expressions familières où il perd d’ailleurs toute saveur et toute valeur. Au point que le « C’est étonnant ! » de nos conversations quotidiennes n’est plus guère qu’un signe d’incrédulité, témoignage paradoxal de notre prétention à tout savoir et prévoir. Tandis que le « Ça ne m’étonne pas ! » banalise systématiquement ce que, bien entendu, nous avions parfaitement prévu… « Plus rien ne nous étonne ! » est devenu ainsi le viatique d’une modernité tout à la fois arrogante et blasée pour qui, de toute évidence, l’étonnement, avec sa modestie naturelle, qui avoue sa surprise mais rechigne à l’exubérance, n’est qu’un signe de faiblesse. Et, pour tout dire, une preuve de niaiserie.

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Filiation, n. f., désigne le rapport entre des parents et leurs enfants. Il ne s'agit pas du rapport biologique, mais de la relation symbolique qui se construit entre deux générations. D'où l'extension de ce terme dans la sphère sociétale et pas seulement familiale.

C'est une banalité de dire, aujourd'hui, que la filiation est en crise. C'est vrai qu'il y a une crise du lignage, de la traçabilité sociale, de l'identification de son propre nom, de la capacité à se situer à l'intérieur d'une généalogie. La plupart des jeunes que l'on dit « en difficulté » sont dans une sorte de présent qui, parce qu'il n'a pas de passé, ne leur permet pas nécessairement d'anticiper un futur. Il y a une sorte de désarticulation entre l'inscription dans une histoire et l'expression dans un présent, cette dernière devenant le « tout » et surdéterminante par rapport à l'inscription dans une histoire...

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Groupe, n. m., terme utilisé communément pour désigner un ensemble d'individus. Dans le domaine pédagogique, les "pédagogies de groupe" sont apparues dans la mouvance de l'Education nouvelle pour promouvoir, à la fois, l'activité et le collectif censés s'opposer à la "méthode traditionnelle" impositive et à la segmentation de la classe en individus concurrents. Leur pratique pose de nombreux problèmes de fond et de méthodes.

Pour comprendre l'usage de la notion de "pédagogies de groupe" telle qu'elle s'est développée depuis le début du siècle et, plus particulièrement, depuis les années 1960, il convient de situer la notion de "groupe" par rapport à la notion de "classe" contre laquelle elle s'est très largement constituée. La "classe", telle que nous la connaissons aujourd'hui, est une invention relativement récente et très limitée géographiquement ; même si aujourd'hui, pour beaucoup de nos contemporains, la classe apparaît comme l'unique modalité institutionnelle possible de transmission des connaissances aux jeunes, elle n'a été systématisée, sous ses formes actuelles, que depuis un siècle et ses premières apparitions datent de quatre siècles environ (on l'appela d'abord "la bande" puis, ensuite, "le rang"). La création de la classe est, sans aucun doute, due, à la fin du Moyen Age, à une volonté d'améliorer l'efficacité des procédures de transmission du savoir en regroupant des jeunes de même niveau de connaissance pour leur proposer en même temps l'apprentissage des mêmes savoirs...

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Innovation, n. f. : terme largement employé pour désigner des initiatives à l'intérieur du système scolaire, tant dans le domaine des pratiques pédagogiques quotidiennes que des impulsions institutionnelles. Totem pour les uns, tabou pour les autres, ce terme fait souvent obstacle à une analyse sérieuse de la réalité.
Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) : Institutions de formation des enseignants mis en place par la Loi d'orientation sur l'école de 1989 et présents dans chaque académie depuis 1991. Ils forment les enseignants du premier et du second degré, de l'enseignement général et professionnel, selon le principe d'une "formation universitaire, professionnelle, d'adultes et par alternance". Ils sont voués à la disparition à partir de la rentrée 2009.
Les Instituts universitaires de Formation des Maîtres, implantés dans chaque académie depuis 1991, ont été créés en application de la loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989. Ils s’inscrivent dans la perspective générale de ce texte qui s’efforce de créer les conditions afin que la démocratisation de l’accès à l’enseignement (souvent nommée « massification ») se traduise par une véritable démocratisation de la réussite dans l’École. En effet, la France a, depuis 1959 et l’instruction obligatoire jusqu’à 16 ans, fait des efforts considérables pour accueillir le plus grand nombre d’élèves – y compris dans les lycées – et les amener jusqu’au plus haut niveau possible de scolarisation. Mais, faute d’une adaptation des structures et de la pédagogie, le système scolaire est resté très inégalitaire. La loi d’orientation de 1989 entend donner une impulsion décisive à la démocratisation en passant d’une logique de la gestion des flux à une logique de l’accompagnement de chacun : elle insiste, pour cela, sur la différenciation des parcours d’apprentissage et promeut une autre conception de l’évaluation, susceptible de permettre d’identifier à temps les difficultés de chacun et de s’appuyer sur ses points forts pour l’aider à réussir.

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Jeu, n. m. : désigne une activité, abusivement considérée comme la spécificité de l'enfance et qui se distingue par un type particulier de rapport au réel, aux autres et au temps. La question de la place du jeu à l'école a souvent été objet de débat, les uns considérant que l'école doit rompre avec l'univers du jeu, les autres en faire un outil pédagogique privilégié.

Pour l'enfant qui rentre à l'école, « on ne joue plus, on travaille ! » En d'autres termes, on ne pourra plus faire « ce qu'on veut », il faudra se soumettre aux injonctions du principe de réalité. Plus question de partir dans des mondes imaginaires où tout est possible, voici venu le temps de se coltiner la résistance des êtres et des choses : il faut être sérieux !... D'où, effectivement, certaines positions qui font du jeu à l'école une hérésie : une régression et un non sens aux regard des finalités scolaires.

Littérature, n. f., ensemble d'oeuvres d'art écrites auxquelles on reconnaît une valeur esthétique. La littérature présente de nombreuses approches des questions éducatives qui permettent d'en saisir les tensions et les enjeux. Le travail sur les textes littéraires est donc tout à fait légitime pour la pédagogie.

Dans un bref et fulgurant roman, Le sagouin, François Mauriac raconte l’histoire d’un enfant perdu, Guillou. Fils d’un baron faible et lâche qu’une bourgeoise arriviste a épousé pour son argent, Guillou, à douze ans, a été renvoyé de deux écoles privées, et l’instituteur du village ne veut pas de lui. Sa mère le méprise profondément et ne cesse de stigmatiser sa laideur, sa saleté et son arriération mentale ; c’est elle qui l’a nommé « le sagouin ». Mais il faut bien faire quelque chose de Guillou et, en dépit de ses préventions à l’égard de l’instituteur laïc, la baronne va supplier ce dernier de prendre Guillou avec lui, non point dans la classe avec les autres enfants, mais le soir, pour tenter de l’occuper et de lui faire faire quelques progrès. Monsieur Bordas, l’instituteur, qui est aussi secrétaire de mairie, correspondant local de L’Humanité et militant politique de gauche promis à une belle carrière, finit par accepter, moins parce qu’il veut sauver cet enfant que parce qu’il ressent quelque attirance trouble pour sa mère.

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Médiation, n. f., désigne, en pédagogie, l'ensemble de ce qui "médiatise" les rapports entre les personnes et leur permet de "se mettre en jeu à propos de quelque chose qu'elles font ensemble". Ainsi définie, la médiation est le moyen d'éviter le face-à-face et le corps-à-corps d'où émane inévitablement la violence.

Le malheur, c'est quand une volonté s'affronte à une autre volonté : « Tu vas travailler et je m'en porte garant ; je ne lâcherai pas prise jusqu'à ce que tu aies compris. Je réexpliquerai jusqu'à ce que tu saches faire et que tu me le prouves. Tu vas te taire et faire ce que je te dis, t'arrêter de crier, de bouger, de te lever tout le temps, de bavarder, d'insulter tes camarades. Ma détermination ne faillira pas. Et tu finiras bien par céder... » Ou bien : « Tu mangeras parce que je le veux. Tu dormiras parce que je le décide. Tu grandiras parce que j'en ai envie. » Une volonté se cabre et renforce la détermination de l'autre. Plus encore, elle la légitime. La relation bascule alors dans une partie de bras de fer infernale. Les deux volontés se font face et la violence est déjà là. Brutale ou sournoise. Immédiate ou différée...

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Mépris, n. m., sentiment par lequel on juge la conduite ou la personne de quelqu'un indigne d'estime. Utilisé le plus souvent, dans les débats éducatifs, à la voie passive : les élèves et/ou les enseignants ont le sentiment d' "être méprisés. Dans ces conditions, le mépris apparaît comme un cercle vicieux : se sentir méprisé par l'autre entraîne le mépris de l'autre.

De nombreuses enquêtes convergentes font observer que le mot qui revient le plus fréquemment dans les propos tenus par les élèves et les enseignants quand ils s'expriment sur ce qui se passe dans l'école est le mot « mépris ». Mépris affiché ou mépris ressenti, mépris exprimé ou mépris supposé... chacun croit que l'autre le méprise et chacun finit par mépriser les autres. Il y a là un phénomène particulièrement significatif de ce que nous vivons aujourd'hui à l'école, sans doute beaucoup plus profond et beaucoup plus grave, beaucoup plus répandu aussi que « la haine » exprimée par quelques élèves en rupture délibérée avec le système. Car les « bons élèves » se sentent aussi méprisés, et, fait étrangement paradoxal, la plupart d'entre eux finissent par se mépriser eux-mêmes en ayant honte de leur propre comportement...

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Méthode pédagogique : expression très générale utilisée pour désigner des réalités d'ordres très différents, mais articulant toujours, in fine, des finalités, des connaissances sur l'apprentissage et des outils à mettre en oeuvre.

L'usage de l'expression "méthode pédagogique" est extrêmement extensif dans la littérature pédagogique. De manière très générale, on peut cependant distinguer trois acceptions dominantes... D'une part, l'expression désigne un courant pédagogique cherchant à promouvoir certaines finalités éducatives et suggérant, pour cela, un ensemble plus ou moins cohérent de pratiques  : c'est en ce sens que l'on peut parler des "méthodes traditionnelles", des "méthodes nouvelles", des "méthodes actives", des "méthodes Freinet", etc.

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Missions (de l'Ecole) : formule souvent utilisée pour désigner les finalités de l'institution scolaire. Même s'il n'est pas sûr que les finalités précèdent chronologiquement et logiquement les institutions chargées de les mettre en oeuvre, il faut, régulièrement, "revenir" aux "finalités" pour interroger les "modalités".

Je refuse qu'on rabatte les missions de l'école sur une simple inculcation de programmes et je revendique qu'on mette au premier plan les principes pédagogiques qui la constituent : 1) L'école est un lieu où la recherche de la précision, de la justesse, de la rigueur et de la vérité l'emporte sur les rapports de force ; 2) L'école est un lieu où - contrairement à l'entreprise - il est plus important de « comprendre » que de « réussir » à n'importe quel prix ; 3) L'école est un lieu où l'erreur est féconde parce qu'elle permet d'analyser un échec et de progresser ; 4) L'école est un lieu où l'on doit toujours donner sa chance à chacun, parier en son éducabilité possible et refuser farouchement l'élimination du « maillon faible »...

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Motivation, n. f., mouvement poussant un sujet à s'engager dans une action ou à entreprendre un apprentissage ; ce mouvement est supposé venir "de l'intérieur" et est souvent considéré comme un préalable pour effectuer une action ou un apprentissage ; on affirme ainsi qu' "il faut être motivé pour"...

La question de la motivation et l’usage même de ce terme dans le discours pédagogique sont relativement récents. Certes, on peut trouver dans l’Émile de Rousseau des situations qui évoquent cette problématique : ainsi, s’agissant « d’exercer à la course un enfant indolent et paresseux », le précepteur distribue-t-il des gâteaux aux enfants qui, sur leur passage, s’adonnent à cette activité… jusqu’au jour où « ennuyé de voir toujours manger sous ses yeux des gâteaux qui lui faisaient grande envie, (l’élève indolent) s'avisa de soupçonner enfin que bien courir pouvait être bon à quelque chose et voyant qu'il avait aussi deux jambes, il commença de s'essayer en secret. » Et, un peu plus tard, le même précepteur, échouant à enseigner à Émile l’astronomie, n’hésite pas à le perdre dans la forêt de Montmorency, à l’heure du déjeuner, afin de lui faire découvrir l’usage des points cardinaux : c’est ainsi que l’élève s’exclamera : « Allons déjeuner, allons dîner, courons vite : l'astronomie est bonne à quelque chose ! »

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Numérique, n. m, désigne l'ensemble des technologies issues de l'informatique et permettant le stockage et l'échange de données, la programmation et la gestion d'opérations complexes, la communication à distance et en "temps réel", la création d'univers virtuel, etc.

Il y a finalement peu de temps que les « technologies de l’information et de la communication » ne sont plus vraiment « nouvelles ». Les premiers ordinateurs personnels ne sont apparus qu’à la fin des années 1970 et le web ne fut créé, lui, qu’en 1990. En vingt-cinq ans, cependant, il a bouleversé radicalement notre univers technologique et professionnel, social et personnel, au point qu’on peut véritablement parler d’une « révolution numérique », probablement aussi importante que celles que constituèrent, jadis, l’apparition de l’écriture puis celle de l’imprimerie.

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Parent d'élève : expression d'usage relativement récent, en rupture avec une certaine conception de "l'Ecole républicaine" selon laquelle "l'élève - contrairement à l'enfant - n'a pas de parents". Néanmoins les "parents citoyens" doivent être associés à l'Ecole, au risque de chercher à contrôler par leurs comportements une institution dont ils seraient exclus.
Parentalité, n. f., néologisme désignant "la capacité à être parent". On peut faire l'hypthèse, que dans des sociétés où les problèmes que rencontraient les parents avec leurs enfants étaient les mêmes que ceux qu'ils avaient posés à leurs propres parents, la parentalité se transmettait "naturellement". Face à l'émergence de problèmes inédits, la parentalité doit devenir un objet de travail éducatif à part entière, qui ne relève ni de l'aide sociale, ni de la psychothérapie.

Longtemps, en effet, il a suffi, pour être un « bon parent », de reproduire avec ses enfants le comportement de ses propres parents. Il y avait, certes, des évolutions, mais elles restaient à la marge. L'éducation morale et sexuelle, le soutien au travail scolaire, la découverte de la vie sociale et des perspectives professionnelles possibles, tout cela demeurait régi par des règles simples et consensuelles. Que votre fille se dévergonde prématurément, et elle était vouée aux gémonies. Que votre fils revienne de l'école avec une punition, et vous doubliez la dose. Qu'il fréquente quelques personnages peu recommandables, et il était bouclé chez lui. Qu'il manifeste quelques réticences pour les fiançailles et le mariage, et c'en était fait de son héritage. Qu'il rechigne à reprendre l'exploitation familiale ou à entreprendre des études supérieures comme on l'y invitait, et il était aussitôt mis au ban. D'ailleurs, dans la plupart des cas, tout rentrait dans l'ordre. Les vraies ruptures familiales étaient le fait de rares personnalités réfractaires et faisaient l'objet d'une interprétation quasi mythologique qui renforçait leur caractère exceptionnel... Rien de tout cela ne fonctionne plus aujourd'hui...

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Parler, verbe, désigne une activité humaine particulièrement importante et constitutive de lien social. Dans l'opinion, l'activité de l'enseignant consisterait essentiellement à "parler". Cette réduction fait fi des spécificités de la parole dans la relation éducative et d'enseignement. Elle oublie qu'enseigner, c'est aussi savoir se taire.

Il n’y a pas si longtemps que cela, les enseignants en formation se gaussaient volontiers de « ces professeurs prétentieux qui font de savants discours pour expliquer qu’il n’en faut point faire ». Il n’est pas certain que les choses aient, d’ailleurs, beaucoup changé : le modèle transmissif du cours dialogué ou de la conférence-débat reste, en effet, très largement dominant dans une formation qui se revendique, par ailleurs, du « constructivisme », qui explique que « les sujets doivent construire eux-mêmes (mais, bien évidemment, jamais « tout seul ») leur propre savoir », que le « conflit sociocognitif et l’interaction entre pairs sont des clés essentielles du développement cognitif ». Dans les classes elles-mêmes, il n’est pas certain que « le cours magistral » ait vraiment reculé au profit de formes plus individualisées de travail, de l’expérimentation ou de la recherche documentaire… Tout se passe comme si, en effet, la parole de l’enseignant était, tout à la fois et simultanément, suspectée et célébrée, objet de toutes les méfiances et de tous les égards.

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Pédagogie, n. f., associée souvent, aujourd'hui, soit à une idéologie molle plaçant l'écoute beâte des enfants au coeur de l'activité éducative, soit à un ensemble de techniques de dressage. En réalité effort pour penser et agir en même temps l'activité éducative, "théorie pratique" selon la formule de Durkheim.

Je ferai, pour ma part, remonter la modernité pédagogique à l'expérience de Pestalozzi. Pestalozzi est un homme des Lumières, proche de la Révolution française (il sera fait citoyen d'honneur de la République). Il croit à la nécessité de transmettre une culture qu'il pense universelle et libératrice, mais, à travers l'expérience de Stans en 1798, il est confronté à la singularité de sujets réfractaires à son enseignement. Ce disciple de Rousseau qui a, toute sa vie, rêvé de « donner des mains » à l' Émile , se refuse au dressage et à l'endoctrinement. Mais il ne bascule pas, pour autant, dans le fatalisme et ne veut pas abandonner les déshérités à leur sort...

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Pédagogie différenciée, expression née dans les années 1970 et qui désigne la recherche systématique de méthodes permettant de faciliter la réussite de chaque élève en prenant en compte ses spécificités. Derrière le relatif consensus dont elle a été l'objet, la "pédagogie différenciée" a, néanmoins, fait l'objet de conceptions différentes, voire contradictoires.

L’engouement pour l’idée de « pédagogie différenciée » est bien plus ancien qu’on ne le croit souvent ! Certes, Louis Legrand n’a créé le syntagme « pédagogie différenciée » qu’en 1974 … Mais, si l’on excepte le préceptorat – sans doute au moins aussi ancien que les premiers regroupements en « classes » –, on peut dire que la différenciation pédagogique est une préoccupation qui a traversé tout le 20e siècle : dès 1907, en effet, Helen Parkhust, aux États-Unis, pose les bases de ce qui deviendra le plan Dalton, et qui est, sans aucun doute, la première entreprise systématique de « pédagogie différenciée ». En 1921, Édouard Claparède publie L’École sur mesure où il écrit : « Lorsqu’un tailleur fait un vêtement, il l’ajuste à la taille de son client et, si celui-ci est gros ou petit, il ne lui impose pas un costume trop étroit sous prétexte que c’est la largeur correspondant dans la règle à sa hauteur… Au contraire, l’école habille, chausse, coiffe tous les esprits de la même façon. Elle n’a que du tout fait et ses rayons ne contiennent pas le moindre choix. Pourquoi n’a-t-on pas pour l’esprit les égards dont on entoure le corps, la tête, les pieds ? ».

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Personne, n. f., au sens le plus général du terme, désigne un être humain sans distinction de sexe. En pédagogie, ce terme est souvent utilisé pour désigner la volonté de prendre en compte la singularité de chaque être, contre des méthodes présentées comme éradiquant cette dernière. A distinguer de la notion de "sujet" qui, elle, insiste plus sur la liberté que sur la singularité, sur l'action que sur le donné.

Sans aucun doute le discours pédagogique, et particulièrement dans la mouvance de l'Education nouvelle, a-t-il fait de l'attention à la personne l'un de ses thèmes majeurs. Encore faut-il bien comprendre que cette insistance avait d'abord une vertu polémique et qu'il s'agissait surtout de s'insurger contre des conceptions éducatives qui faisaient de l'éradication des différences individuelles la condition de la réussite de l'Ecole républicaine. Nous étions alors au 19ème siècle et la laïcité de combat qui cherchait à s'imposer n'était nullement une tolérance bienveillante à l'égard des particularités de toutes sortes ; c'était une véritable machine de guerre pour imposer l'unité d'une culture contre la diversité des traditions, l'unité d'une langue contre la multiplicité des patois, l'unité des élèves comme "êtres de raison", supposés disponibles à l'expression encyclopédique de la rationalité scientifique contre la multiplicité des situations individuelles, des adhérences psychologiques inégalitaires et des appartenances sociologiques génératrices de privilèges...

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Philosophe, n. m., personne s'adonnant à la philosophie. Par restriction académique et médiatique, personne enseignant la philosophie ou habilitée à parler publiquement pour légiférer sur la question des fins. Certains "philosophes", ainsi définis, considèrent "les pédagogues" comme des ennemis...
 Poésie, n. f. : genre littéraire considéré traditionnellement comme de grande valeur pédagogique, beaucoup utilisé à l'école primaire, tombant progressivement en désuétude après et fort peu prisé par le public adulte si l'on en croit les ventes d'ouvrages.   

La professeure de français a commencé, il y a plusieurs mois, un travail sur la poésie. Elle sait qu’avec ses élèves ce n’est pas chose facile : la poésie n’a pas bonne presse chez les lascars du collège et seules quelques filles osent parfois, fugacement, marquer leur intérêt pour un poème. Pourtant elle ne s’est pas découragée et a multiplié les approches, les exercices, les jeux sur le langage. Elle a affiché quelques textes poétiques dans la classe. Elle a lu et fait lire toutes sortes de poèmes, tenté de faire rédiger des alexandrins, s’est rabattue sur des haïkus, a affronté le scepticisme et les moqueries. Sans se décourager…

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Projet, n. m. : "mot valise" utilisé de manière souvent ambiguë. Il peut renvoyer à une idéologie libérale considérant la mise en concurrence des projets comme une garantie de qualité ou, au contraire, se présenter comme une alternative sociale et politique capable de promouvoir le collectif et la solidarité.

Il n'est pas rare, aussi bien en famille qu'en classe ou dans n'importe quel groupe, qu'un enfant se fasse remarquer par une attitude que les adultes trouvent envahissante, voire insupportable : c'est un signe qu'il faut savoir interpréter. Quand un enfant veut toute la place, c'est qu'il n'a pas de place. Quand il occupe tout l'espace, c'est qu'il n'a pas d'espace à lui, où se réfugier et d'où se déployer. Quand il veut tous les rôles, c'est qu'il ne se sent affecté à aucun et, donc, profondément inutile. Or, on ne trouve une place que dans un projet dont on est partie prenante.

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Radicalité(s), n. f. : terme utilisé le plus souvent avec une connotation religieuse pour désigner une forme d'adhésion-engagement à une doctrine manichéenne à caractère totalitaire. Peut se dire, plus largement, à propos de toute posture d'enfermement idéologique et de fermeture radicale à l'égard de tout échange avec quiconque ne partage pas sa position. Renvoie souvent à une forme de crispation identitaire. La question de la radicalité n’est pas nouvelle… Mais elle se pose sans doute aujourd’hui d’une manière beaucoup plus incisive parce qu’elle renvoie à des comportements qui ne peuvent plus être caractérisés systématiquement de « délit » ou de « folie ». Jusqu’à présent, en effet, les personnes qui refusaient d’entrer dans l’échange raisonnable avec autrui, étaient soit des délinquants dangereux et il fallait les punir, soit des fous irresponsables, et il fallait les enfermer. Ce qui se passe aujourd’hui, c’est que nous voyons émerger des refus d’engager le dialogue avec autrui, des posture de renfermement identitaire qu’on ne peut caractériser ni de délictueuses ni de folles. Il y a des comportements publics et assumés de refus radical d’entrer dans l’échange et de se barricader en quelque sorte dans une identité qui ne relèvent pas de la criminalité ou de la pathologie. Alors à quoi cela renvoie-t-il ?

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Récit, n. m. : désigne le plus souvent une forme littéraire qui se décline dans différents genres (romans, nouvelles, théâtre, reportage, etc.), mais renvoie aussi à la capacité essentielle d'un sujet d'articuler des "faits" et de les transformer en "événements" ; il constitue, à ce titre, un élément fondamental de la construction de l'intelligence er exige une formation spécifique, tant dans la famille que dans l'institution scolaire.

Jean Piaget, en 1925, s’intéresse à la manière dont des enfants de quatre à douze ans parviennent à construire un récit à partir d’un couple d’images : « Regarde bien ces deux images. C’est la même histoire. La première, c’est le commencement de l’histoire. L’autre, c’est la fin de l’histoire. Regarde bien et raconte moi toute l’histoire. » Les enfants soumis à ce test rencontrent de grandes difficultés à relier les deux images. Pourtant les mêmes personnages y figurent de façon très explicite et les liens possibles entre les deux situations faciles à imaginer… Jusqu’à huit ans, les trois quarts des enfants ne sont pas capables – bien qu’on le leur dise que les deux images représentent une même histoire – d’identifier les personnages communs, au dessin pourtant très caractéristique. C’est au-delà de huit ans que les enfants repèrent progressivement la possibilité d’une relation, ce qui amène Piaget à conclure que « la difficulté à identifier les personnages correspondants d’une série d’images n’est que le cas particulier d’une difficulté très générale chez l’enfant et que l’on peut appeler la difficulté à faire interférer les groupements logiques. »

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Règlement intérieur : texte réglementaire existant dans chaque établissement scolaire et chargé, selon les circulaires officielles, de "donner vie à la communauté éducative et de lui apporter les moyens de sa mission". Il est censé définir clairement les règles de fonctionnement ainsi que les droits et les obligations de chacun. La création de l’École comme espace spécifique destiné aux apprentissages requiert, en elle-même, la mise en place, explicite ou implicite, d’un règlement intérieur. En effet, ce qui caractérise l’enseignement scolaire, c’est qu’il s’efforce d’échapper au caractère aléatoire, désordonné et « déréglé » des expériences d’apprentissage qui sont faites dans le milieu familial, social ou professionnel. À l’école, on apprend dans un cadre précis avec des objectifs identifiés qui requièrent des comportements stabilisés. À l’école, il faut des règles qui rompent avec les habitudes du dehors : des règles qui permettent de rendre les élèves disponibles à une transmission des savoirs qui se veut progressive, exhaustive et de plus en plus, au fur et à mesure de l’histoire, démocratique.

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Remédiation, n. f., néologisme construit à partir de la métaphore médicale du "remède" qui vient soigner un mal identifié à partir d'un diagnostic. Très utilisé aujourd'hui en pédagogie, avec le danger que le trairement de la difficulté ou de l'échec scolaire ne s'effectue qu'a posteriori. Le développement des dispositifs de « remédiation » est, aujourd’hui, considéré comme « la » solution contre l’échec scolaire et fait l’objet d’annonces régulières… Première conséquence : l’empilement de ces dispositifs leur fait perdre progressivement toute lisibilité. Comment les familles peuvent-elles comprendre à quoi correspond exactement les programmes de réussite éducative, le soutien personnalisé, l’accompagnement éducatif, l’aide aux devoirs, les études dirigées, les stages de remise à niveau pendant les vacances ? Quelle fonction pour chacun de ces dispositifs ? À qui s’adressent-ils exactement ? Avec quels critères et quels objectifs précis ?

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Sanction, n. f., terme employé pour désigner un acte qui fait suite à un événement ; s'entend au sens de "sanction naturelle" (conséquence inévitable) et de "sanction sociale" (mesure délibérée). En éducation, la sanction est, le plus souvent, entendue négativement (mesure répressive). En pédagogie, la question est de savoir : quelles sanctions mettre en oeuvre pour réintégrer quelqu'un que sa faute a exclu du groupe ?
Sanctuaire, n. m. : désigne habituellement un édifice religieux dédié au culte. A été utilisé, depuis quelques années, pour désigner les écoles et établissements scolaires qu'on veut soustraire à l'influence (voire à l'irruption) de l'environnement. La "sanctuarisation" de l'école doit néanmoins être interrogée.

Je voudrais montrer : 1) que l'Ecole est, à bien des égards, une institution construite pour résister aux pressions de l'environnement ; 2) que la "clôture scolaire" craque aujourd'hui de toutes parts ; 3) que, plutôt que de se crisper sur des modes de fonctionnement obsolètes, l'Ecole doit redéfinir ses fonctions essentielles et retrouver sa vocation première ; 4) que, une fois cette vocation clarifiée, l'Ecole peut engager de nouveaux rapports avec son environnement en conservant, voire renforçant sa spécificité, mais sans, pour autant, se "sanctuariser".

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Sciences de l'éducation : soixante-dixième section des universités créée en 1967 (avec un pluriel délibéré). Fait l'objet de beaucoup de représentations fantasmatiques et, également, d'un vrai débat épistémologique sur leur unité.
Scolarité obligatoire : en France, contrairement à ce que l'on croit, ce n'est pas la scolarité mais l'instruction qui est obligatoire jusqu'à 16 ans. A cet égard, la scolarité obligatoire à 16 ans reste un combat à mener.
Sens, n. m., mot très souvent employé en pédagogie, en particulier dans l'expression "donner du sens aux savoirs". Cette expression est, d'ailleurs, devenue un lieu commun des pédagogues qui irrite particulièrement leurs adversaires. C'est pourquoi elle mérite d'être clarifiée et discutée.

"Donner du sens" aux apprentissages est devenu, aujourd'hui, un lieu commun pavé des meilleures intentions du monde. Mais il ne faudrait pas croire qu'il s'agit là d'une opération facile, voire mécanique, qui serait susceptible d'une systématisation grâce à des "techniques" didactiques éprouvées. S'il y a, incontestablement, une part de technicité dans la "création du sens", ce dernier s'inscrit toujours dans une relation pédagogique qui échappe, par définition, à toutes les tentatives d'enfermement. S'agissant du "sens" - et que nous le voulions ou non - nous sommes toujours dans une "transaction", dans un travail permanent sur le désir, un effort pour aboutir à des compromis tenables sans passer - ou en passant le moins possible - par la répression ou par la manipulation...

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Situation-problème, expression utilisée en pédagogie et didactique pour désigner une situation d'enseignement-apprentissage ou les contraintes et les ressources sont organisées de telle façon que l'élève, mobilisé par un projet, rencontre un obstacle et, pour le surmonter, acquière des savoirs déterminés.

Le concept de "situation-problème" ne doit pas être considéré comme une invention récente de la didactique. Même si, sous cette dénomination il ne remonte sans doute qu'à Piaget, il exprime, en réalité, un projet bien plus ancien et, sans doute, constitutif de la pédagogie moderne... Il faut nous rappeler, en effet, que les théories classiques de l'apprentissage telles qu'on les trouve énoncées chez Platon, Aristote et Augustin, cherchaient d'abord à surmonter un paradoxe, à dépasser une aporie qui paraissait alors rendre précisément impossible tout apprentissage : "Comment apprendre à faire quelque chose qu'on ne sait pas faire si ce n'est en le faisant ? Et comment peut-on le faire puisque, justement, on ne sait pas le faire ?"...

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Temps, n. m., réalité vécue très différemment dans la durée par chacun des protagonistes de l'entreprise scolaire. A l'école, il y a un "emploi du temps" et un découpage de celui-ci selon une mécanique qui ne laisse pas toujours à chacun "le temps d'apprendre".
Théâtre, n. m., désigne un espace dédié à l'espression vocale et corporelle de quelques individus nommés "acteurs" devant d'autres individus nommés "spectateurs", ainsi que l'ensemble des textes et directives qui gégissent l'utilisation de cet espace. En matière éducative, le théâtre a été considéré comme un outil pédagogique majeur il y a longtemps en France (dans les écoles jésuites) ; il est considéré comme une "discipline scolaire" à part entière dans de nombreux pays du monde.

Franchir la porte d'une salle de théâtre, c'est, à coup sur, entrer dans un autre monde. Tout, ici, est fait pour signifier qu'on est ailleurs : il y a une sorte de cérémonial qui donne, d'emblée, un sentiment d'étrangeté. C'est le contraire du cinéma où l'on s'installe en terrain conquis, un cornet de pop-corn à la main, attendant, en consommateur discipliné, le début d'une nouvelle séance, immanquablement identique à la précédente... Au théâtre, en revanche, il faut entrer avec d'infinies précautions ; avec le sentiment qu'on risque de déranger, qu'on vient assister, un peu par effraction, à un événement unique. Que quelque chose d'étrange va se produire sous nos yeux et, contre toute logique cinématographique, que cette chose va vivre de nos regards. C'est pourquoi il vaut mieux préparer les enfants avant de les amener voir un spectacle de théâtre. Explorer avec eux les coulisses en secret. Susciter leur curiosité en leur faisant entrevoir les loges et la machinerie. Leur laisser saisir quelques bribes de répétition. Pour donner plus de tension à l'attente... Jusqu'au moment fatidique où l'on entre dans la salle. Avec un peu d'anxiété parfois, car il n'est pas mauvais qu'on craigne d'avoir peur, de s'ennuyer ou de ne pas comprendre...

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Tiers-lieu éducatif, expression apparue récemment et qui désigne, à côté de la famille (lieu de la construction de la filiation) et de l'école (lieu de la transmission ordonnée des savoirs), les espaces éducatifs où des pairs peuvent rencontrer des ex-pairs qui ne sont pas détenteurs d'une autorité institutionnelle mais, déjà jeunes adultes ou adultes, peuvent jouer un précieux rôle de passeurs.

Des dangers menacent le passage des jeunes à l'âge adulte : le repli communautariste, la domination d'une doctrine officielle ou d'un « politiquement correct » trop souvent véhiculé par les grands médias, la marchandisation des loisirs. Mais aussi, malgré la multitude des sollicitations dont les jeunes sont l'objet, l'anomie et le repli devant un monde trop souvent indifférent aux problèmes qui les préoccupent. Minoritaires en effet sont ceux qui sont vraiment aidés à construire leur identité. Il existe dans la société plusieurs institutions et divers lieux qui contribuent à l'éducation des jeunes. Cette pluralité est un fait, et elle est justifiée en droit. Demander à l'école d'être responsable du tout de l'éducation, c'est la surcharger inutilement. Hors de leur famille et de leur école, les jeunes ont besoin d'un troisième lieu...

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Traces écrites, expression qui désigne les traces écrites autres que les évaluations,nproduites par l'élève, en classe ou personnellement, à la demande du professeur (cahiers, carnets, classeurs, etc.). Existent sous forme papier ou numérique.

Au traditionnel « cahier du jour » où mes élèves puis, plus tard, mes étudiants reportaient cours et exercices au fur et à mesure de nos rencontres, j’ai, toujours, à l’école primaire, comme au collège, au lycée et à l’université, exigé qu’ils ajoutent, tout à la fois, un classeur, afin d’archiver rigoureusement tous les documents que je leur fournissais ou qu’ils trouvaient par eux-mêmes, mais aussi un ou plusieurs carnets leur permettant de sauvegarder, de manière synthétique et systématique, leurs principales acquisitions. Nul doute que beaucoup trouveront ces exigences exagérément formalistes et, peut-être même, infantilisantes. Un professeur n’a-t-il rien de mieux à faire que de s’intéresser ainsi aux outils de travail de ses élèves ? À quoi rime cette insistance – qui, je l’avoue bien volontiers, tournait chez moi à l’obsession – sur une question si triviale et apparemment si secondaire au regard de la rigueur des contenus enseignés ?

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Transfert, n. m., terme qui désigne originellement une action de déplacement. Utilisé en pédagogie et en didactique, en particulier dans l'expression "transfert de connaissance", pour signifier l'utilisation d'un savoir dans un autre cadre contexte (informationnel, matériel, institutionnel) où il a été acquis. Objet de nombreux débats.

La question du transfert des connaissances est, à bien des égards, au centre de toute réflexion sur l'éducation et la formation. A un premier niveau, elle consiste à s'interroger sur les conditions qui permettent à un sujet de réutiliser des connaissances acquises dans une situation pédagogique, ailleurs et à sa propre initiative. Elle est donc liée à toute interrogation sur l'efficacité d'une situation d'apprentissage: celle-ci permet-elle seulement de réussir les épreuves d'évaluation finale (examen, validation interne) ou a-t-elle une portée à plus long terme qui permet au sujet un accès à l'autonomie? Sur un plan plus général, la question du transfert de connaissances renvoie aux moyens que le pédagogue met en oeuvre pour permettre au sujet de se dégager des liens et systèmes d'aide qui lui auront été nécessaires à un moment donné de son évolution...

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Transmission, n. m., terme souvent opposé - à tort - par les pédagogues à "construction du savoir". En réalité, il n'existe aucune "construction" du savoir sans "transmission" par l'éducateur (même si cette transmission prend la forme de conditions que l'on met en place). Pas d' "humaine condition" sans transmission entre les générations et entre les hommes. Mais si transmettre est un impératif, la transmission n'est pas une normalisation.

Il n'est pas d'exemple d’être humain qui ait pu atteindre le statut d'adulte sans d'autres êtres humains, adultes ceux-là. L'enfant, en effet, vient au monde infiniment démuni et il ne peut grandir que s'il est introduit dans le monde, si des adultes « font les présentations » et prennent en charge son arrivée dans la maison. Là, il lui faut apprendre les règles de ceux qui l’accueillent. Ce n’est jamais facile : l'intégration dans la domus est toujours, peu ou prou, une entreprise de « domestication », une affaire d'horaires à respecter, d'habitudes à prendre, de codes à acquérir, d'obligations auxquelles il faut se soumettre… Et celui qui arrive ne peut pas choisir lui-même ce à quoi il doit être éduqué. Nos enfants ne choisissent pas la langue dans laquelle ils vont s'exprimer, les coutumes avec lesquelles ils vont vivre. Pas plus qu’ils ne pourront, pendant la scolarité obligatoire, choisir les disciplines qu’ils devront apprendre. Si l'enfant pouvait choisir ses objets d'apprentissage, c’est qu’il serait déjà éduqué. Aucun « respect » ne peut justifier ici l’abstention éducative. L’adulte a un impératif « devoir d’antécédence ». Il ne peut abandonner l’enfant sans lui transmettre les moyens d’être au monde, d’habiter le monde, de comprendre et de prolonger le monde.

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Universalité, n. f., désigne ce qui concerne (ou pourrait concerner) tous les hommes en tant qu'ommes et non dans leur singularité. En pédagogie, la question est donc de savoir comment faire accéder des individus singuliers à l'universel.

L'universalité est un thème central qui affleure systématiquement dans les débats contemporains sur l'Education. D'un côté, on affirme que "toutes les cultures se valent" et l'on considère comme valeur suprême le "respect de la différence"... D'un autre côté on pointe les excès que le droit à la différence laisse commettre, on souligne qu'une telle position interdit à un sujet d'interroger les valeurs de son environnement et de s'exhausser au dessus d'elles ; on propose alors des valeurs de référence qui sont précisément celles élaborées à partir du critère d'universalité...

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Utopie, n. f., terme forgé par Thomas More dans l'ouvrage qui porte ce nom. Désigne, plus largement, un monde idéal à construire, et, par extension, un projet d'avenir que certains considèrent comme "irréalisé" alors que d'autres le croient "irréalisable". Contrairement aux représentations les plus répandues chez ses partisans comme chez ses adversaires, la pédagogie ne fait pas « naturellement » bon ménage avec les utopies. Tout au contraire ! Que l’on définisse, en effet, la pédagogie, selon la tradition étymologique, comme « accompagnement » de l’enfant vers le précepteur, ou que l’on préfère une définition plus conceptuelle en la considérant comme une relation nécessaire et provisoire visant à l’« émergence » d’un sujet autonome, dans les deux cas, ce qui la caractérise, c’est le mouvement : « accompagnement » ou « émergence » sont opposés, en effet, à tout enkystement. Être « pédagogue », c’est ainsi refuser, tout aussi bien, l’enfermement et la fatalité, c’est lutter contre toute assignation à résidence et toute reproduction sociologique ou mimétique...

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